Le recours a l'arbitrage

LE RECOURS A L'ARBITRAGE


L'arbitrage dans le cadre d'un conflit d’associés est un mode alternatif de résolution des différends par lequel les associés confient à un arbitre ou à un tribunal arbitral le soin de trancher leur litige. Contrairement à la médiation, où le médiateur aide à faciliter un accord sans imposer de décision, l’arbitrage conduit à une décision contraignante appelée sentence arbitrale. Cette procédure est souvent choisie pour sa confidentialité, sa rapidité, et parce qu'elle offre aux associés un certain contrôle sur le choix de l’arbitre et sur les règles de procédure.


Fondements et cadre juridique de l'arbitrage

L'arbitrage est encadré en France par les articles 1442 à 1527 du Code de procédure civile. Pour qu’un conflit entre associés puisse être résolu par arbitrage, il est nécessaire de prévoir une clause compromissoire dans les statuts de la société ou de signer un compromis d’arbitrage une fois le conflit survenu.

  • Clause compromissoire : Elle est insérée dans les statuts dès la constitution de la société et stipule que les litiges entre associés seront réglés par arbitrage. La clause compromissoire s’applique automatiquement à tous les litiges entre associés couverts par la clause.
  • Compromis d’arbitrage : Il est signé après la survenance du litige, quand les parties conviennent de soumettre le conflit à un arbitre ou à un tribunal arbitral pour ce différend spécifique.


Objectifs et avantages de l’arbitrage en cas de conflit d’associés

Le recours à l’arbitrage présente plusieurs avantages, notamment :

  • Confidentialité : L’arbitrage est une procédure privée, qui permet de protéger la réputation de la société et d’éviter que les détails du conflit ne soient exposés publiquement. Cela est particulièrement important dans le cas de litiges complexes ou sensibles.
  • Rapidité : L’arbitrage est souvent plus rapide que la voie judiciaire, car les parties peuvent convenir d’un calendrier et éviter les longs délais d’attente des juridictions civiles ou commerciales.
  • Choix de l’arbitre : Les associés ont la possibilité de choisir un arbitre ou des arbitres spécialisés en fonction de la nature du litige, garantissant ainsi une expertise adaptée aux spécificités de la société et de l’industrie.
  • Décision contraignante : La sentence arbitrale est définitive et contraignante. Elle a la même force exécutoire qu’un jugement rendu par un tribunal, bien que les possibilités de recours soient limitées.


Procédure de l'arbitrage

La procédure d’arbitrage suit des étapes spécifiques, qui peuvent être adaptées par les parties pour répondre aux besoins du conflit :

  • Désignation des arbitres : Les parties choisissent un ou plusieurs arbitres, généralement des experts dans le domaine du droit des sociétés ou de l’industrie concernée. Elles peuvent également recourir à un centre d’arbitrage, comme la Chambre de commerce internationale (CCI), pour gérer le processus.
  • Définition du cadre de l’arbitrage : Les parties peuvent convenir de règles spécifiques pour l’arbitrage, y compris les délais, les moyens de preuve et les modalités de présentation des arguments. Ces règles peuvent être personnalisées ou inspirées des règles de centres d’arbitrage, comme celles de la CCI ou de la Chambre arbitrale internationale de Paris.
  • Présentation des arguments et des preuves : Chaque partie présente ses arguments et ses preuves devant l’arbitre, de manière plus souple que dans un tribunal. La procédure est plus flexible, ce qui permet de s’adapter à la complexité des relations entre associés.
  • Rendue de la sentence arbitrale : Après avoir entendu les parties, l’arbitre rend une sentence arbitrale qui résout le litige. Cette sentence est exécutoire, c’est-à-dire qu’elle a force de loi, et elle est immédiatement applicable. Elle peut prévoir différentes solutions, comme la cession de parts, la modification de statuts, ou la répartition des actifs.
  • Exécution de la sentence : La sentence arbitrale est contraignante et peut être exécutée en France et à l’étranger en vertu de la Convention de New York de 1958 sur la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères.


Limites de l’arbitrage

Malgré ses avantages, l’arbitrage présente également certaines limites :

  • Coût élevé : Les frais d’arbitrage (rémunération des arbitres, frais de centre d’arbitrage, frais d’expertise) peuvent être plus élevés que ceux d’une procédure judiciaire, surtout pour des litiges complexes impliquant plusieurs arbitres et des expertises techniques.
  • Absence de recours : La sentence arbitrale est définitive et les possibilités de recours sont très limitées, sauf en cas d’irrégularités graves (par exemple, lorsque la sentence est contraire à l’ordre public). Cela peut être perçu comme un risque si l’une des parties est insatisfaite de la décision.
  • Non-adapté aux conflits graves et déséquilibrés : Si un associé a une position de force ou de majorité, il peut influencer la désignation des arbitres ou la conduite de la procédure. L’arbitrage peut être moins protecteur pour les associés minoritaires que le recours judiciaire dans certains cas.


Jurisprudence et arbitrage

La jurisprudence française soutient largement le recours à l’arbitrage pour les conflits d’associés, à condition que la clause compromissoire soit valide et conforme aux statuts de la société. La Cour de cassation a confirmé dans plusieurs arrêts la validité des sentences arbitrales en matière de conflit d’associés, rappelant notamment que les parties qui ont volontairement choisi l’arbitrage ne peuvent pas se soustraire à la décision arbitrale en invoquant des erreurs de droit ou de fait (Cass. civ. 1, 15 janvier 2015, n° 13-26.463).

Alternatives à l’arbitrage


Si l’arbitrage ne semble pas adapté, d’autres méthodes peuvent être envisagées :

  • Médiation : Moins formelle et contraignante, elle permet de trouver une solution amiable avant d’opter pour l’arbitrage ou la voie judiciaire.
  • Droit de retrait ou d’exclusion : Les associés peuvent également envisager le retrait volontaire ou l’exclusion d’un associé pour résoudre le conflit.
  • Scission de la société : En cas de désaccord irréconciliable, une scission des activités de la société peut être une alternative pour permettre à chaque groupe d’associés de poursuivre son activité séparément.


En résumé, l’arbitrage est une solution rapide et confidentielle pour résoudre les conflits d’associés. Il permet d’obtenir une décision contraignante et exécutoire, bien que le coût et la limitation des recours puissent représenter des inconvénients pour certaines parties.

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